Marine Moutot :
TOP 2018
- Call me by your name – Luca Guadagnino
Quoi de plus beau qu’une histoire d’amour naissante ? En 1983, dans une villa en Italie, Elio fait la rencontre d’Oliver, un Américain étudiant de son père. Sous la chaleur du soleil italien, dans une ambiance douce et tranquille, les corps et les émotions se disputent. Luca Guadagnino met en scène Armie Hammer et Thimothé Chalamet — une révélation — dans un long-métrage puissant sur l’amour. Nous voilà nostalgiques d’une époque que nous ne connaissons pas. La seule violence que le film met en scène est celle des sentiments. Durs, purs.
- 3 Billboards : Les Panneaux de la vengeance – Martin McDonagh
Mildred Hayes, dont la fille fut violée avant d’être brûlée, décide de louer trois panneaux publicitaires sur une route presque déserte pour accuser la police d’inaction. Entre rage de connaître la vérité et rage tout court, Mildred — joué par Frances McDormand — est une héroïne féminine qui a une force incroyable. L’humour noir et cynique de Martin McDonagh nous ravit une fois de plus dans ce film coup de poing qui a marqué 2018 et le reste de l’histoire du cinéma durablement. Pour compléter le casting : Sam Rockwell et Woody Harrelson. Jubilatoire on vous dit.
- Leto – Kirill Serebrennikov
Le film commence rapidement, la musique vibre dès les premiers instants, tout comme la censure qui empêche la jeunesse de profiter pleinement des concerts rocks. Dans une Russie des années 1980, nous suivons la trace de musiciens qui vont définitivement marquer l’univers rock russe. Biopic peu conventionnel qui explose l’image et le rythme. Il m’aura fait penser à un autre long-métrage dont la musique punk avait ouvert l’image pour également la déglinguer. How to talks to girls at parties de John Cameron Mitchell avait sa place dans ce top. Les deux sont pleins de vies, d’amours et de chansons.
- Les Chatouilles – Andréa Bescond, Eric Métayer
Ce premier long-métrage sur une jeune femme ayant été violée dans son enfance est à la fois terriblement triste, sur la détresse d’une enfant et terriblement beau, sur la survie d’une adulte. Le film entrecoupé par des moments de danses qui donnent l’ampleur de la détresse du personnage est à couper le souffle. Le spectateur ne sort pas indemne de ce film fort qui parle avec justesse d’un sujet encore aujourd’hui trop tabou.
- Girl – Lukas Dhont
Ce premier long-métrage sur une jeune fille, Lara, qui aspire devenir danseuse étoile. Née garçon, Lara doit combattre ses démons intérieurs, son impatience pour réaliser ses deux rêves. Lukas Dhont prend son sujet à bras le corps, cerne à la perfection cette jeune fille, ses désirs, ses envies et comment elle doit lutter avec elle-même pour survivre. Il nous offre un récit fort et puissant. En déplaçant le problème — sa famille accepte entièrement qu’elle veuille changer de sexe — il montre comment une personne doit lutter quand elle ne se sent pas à sa place. Un film profondément juste qui n’hésite pas à nous faire souffrir pour nous mettre à la place de Lara — interprétée par l’excellent Victor Polster.
- Jusqu’à la garde – Xavier Legrand
Après un premier court-métrage remarqué, Avant que de tout perdre, sorti en 2013, le jeune cinéaste français revient avec le couple Besson qui divorce. Le partage de la garde des enfants se fera dans la souffrance. Julien, le jeune garçon interprété par Thomas Gioria, se retrouve entre ses parents sans savoir ce qu’il peut faire. Le film monte en tension pour exploser dans une scène finale où l’on aura rarement eu autant le souffle coupé par l’effroi. Ce premier long-métrage montre déjà toute la maîtrise de Xavier Legrand. - Dogman – Matteo Garrone
Dogman raconte l’histoire d’un homme qui essaye de joindre les deux bouts pour survivre dans une banlieue portuaire italienne. Marcello est toiletteur. Il a au fond de lui un peu honte et rêverait d’offrir plus à sa fille qu’il ne voie pas souvent. C’est un type sympa, effacé qui ne fait pas de vague. Mais voilà, à cause de son caractère trop gentil il se fait entraîner dans une spirale infernale. Matteo Garrone — réalisateur de Gomorra — revient un film âpre, sincère et qui doit énormément à l’interprétation de son acteur principal : Marcello Fonte.
FLOP 2018
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The House That Jack Built – Lars Von Trier
Le cinéaste danois a encore frappé. Avec ce nouveau long-métrage, il provoque toujours plus et crée un film pédant qui ne prend aucun recul sur ce qu’il dit ou montre. Jack est un architecte qui rêve de construire la maison idéale. Se proclamant artiste, il tue des femmes qui croisent sa route — étrangement toutes sont stupides ou chiantes. Entre faux effets de style et misogyne assumé, ce long-métrage est non seulement peu esthétiquement intéressant, mais très énervant moralement.
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Diamantino – Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt
Le film encensé à la Semaine de la Critique au dernier Festival de Cannes est l’œuvre des cinéastes portugais et américains Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt. Il raconte l’histoire de Diamantino, le meilleur footballeur du monde. Suite à une défaite, il est recruté par le gouvernement portugais qui souhaite se servir de son intelligence pour créer une armée. Entre une mise en scène lourdingue et moche, le scénario se veut un emprunt à tout ce que la pop culture fait de mieux. Le détournement ne réussissant pas, le film est à la fois vulgaire et insultant. -
Donbass – Sergei Loznitsa
Le réalisateur ukrainien, après avoir réalisé l’ennuyeux et dérangeant Une femme douce, réalise un film qui se veut une critique de ce qui se passe actuellement en Ukraine – enfin je crois. L’action prend place dans une région de l’Est, le Donbass où se déroule des actions pour le moins grotesque, en tout cas sans queue ni tête. La mise en scène pèche par une lourdeur excessive et c’est sans finesse que le film perd son spectateur. -
Volontaire – Hélène Fillières
La réalisatrice française réalise un long-métrage plat sur la lutte pour trouver sa place d’une jeune femme dans la Marine nationale. Le principal problème du film est d’adoucir sans cesse les épreuves que passe Laure. Elle veut nous faire croire à la violence d’un milieu sans nous en montrer la réalité. À force d’affaiblir les images, elle affaiblit ses personnages par lesquels rien ne passe : ni émotion, ni information, ni intérêt. Volontaire est un sous Full Metal Jacket. -
À Genoux les gars – Antoine Desrosières
Cette comédie pose un problème de taille aux spectateurs : comment inscrire le plaisir qu’à une jeune fille à sucer des bites ? La gêne s’installe rapidement, car le cinéaste et les scénaristes se disent que quoiqu’il peut arriver aux jeunes femmes de l’histoire, elles pourront toujours se venger en leur faisant une blague. Mais à aucun moment, ne considère que Yasmina quand elle suce la bite du copain de sa sœur a subi un viol. Alors entre une image sale et une morale sale, le film dérange, mais pas dans le bon sens du terme. -
Vers la lumière – Naomi Kawase
La réalisatrice japonaise raconte l’histoire de Masako qui décrit les films pour les non-voyants. Lors d’une séance, elle fait la rencontre d’un photographe qui perd la vue. Terne, lent et sans émotion, Vers la lumière est un long-métrage pompeux sur un amour sans intérêt. -
Don’t worry, He won’t Get far on Foot – Gus Van Sant
Le dernier film de Gus Van Sant a un gros problème de rythme. Alors qu’il parle d’un dessinateur subversif et d’un sujet plutôt subversif aussi, il entame avec ce long-métrage une contemplation intérieure avec des flous, des effets de caméra portée. Beaucoup de moments gênants et surtout beaucoup beaucoup d’ennui. Le comble pour raconter la vie du dessinateur John Callahan et de son humour insolent.
Manon Koken :
TOP 2018
- 3 Billboards : Les Panneaux de la vengeance – Martin McDonagh
Tout part d’un fait divers : une jeune femme violée et tuée dans la petite ville d’Ebbing dans le Missouri. Frances McDormand est la mère avide de vengeance, Woody Harrelson, le chef de la police malade. Et en plus, on retrouve avec joie Martin McDonagh à la réalisation. Humour noir et héroïne coenienne sont au rendez-vous. On est en haleine, on attend, on se questionne : tout ceci est-il moral ? Autour de ce personnage féminin (fort) bien écrit se cristallise toute l’intrigue policière au scénario haletant. A voir aussi : Bons baisers de Bruges et Sept psychopathes (et puis un petit passage par Fargo pour bien commencer l’année). - Leave no trace – Debra Granik
En 2010, Debra Granik nous offrait Winter’s Bone et l’interprétation impressionnante de Jennifer Lawrence en grande soeur protectrice et débrouillarde. Encore un très beau film centré sur un personnage féminin fort ! Avec Leave no trace, c’est une histoire d’amour filial qui nous est contée. La jeune Tom et son père Will vivent hors des sentiers (re)battus du rêve américain. Renvoyer au loin le self-made man, le consumérisme et l’idée d’un chez-soi établi, voilà ce que fait cet ancien combattant en élevant seul sa fille au coeur d’une forêt de l’Oregon, près de Portland. Montrer les marges de la société étatsunienne, c’est tout l’intérêt du propos. Proximité documentaire et finesse de l’écriture et du jeu des acteurs embellissent cette adaptation libre du roman L’Abandon de Peter Rock, lui-même inspiré d’un fait divers. - Burning – Lee Chang-Dong
Où est la brûlure chez les personnages ? Quel bâtiment va donc s’enflammer ? Quand donc la pellicule prend-elle feu ? Burning est une longue mise à feu, on l’attend avec appréhension et une pointe d’impatience, on apprécie son mystère et son rythme lent, on savoure la contemplation. L’image, toute de noir et blanc composée, est superbe, le récit intrigant, bien que simple, grâce à son montage intelligent qui brouille la frontière entre réel et onirique. Quand on pense saisir les personnages, ils nous échappent. Et seuls semblent planer les interrogations et le mystère. - Girl – Lukas Dhont
Puissant et touchant, voilà les deux mots qu’il nous reste à la sortie de cette séance. Lukas Dhont réussit le pari de faire comprendre à tout un chacun le désir de transition (et sa violence) chez un jeune homme qui se veut femme. Et quel plus beau moment pour nous le montrer qu’à l’adolescence avec le corps d’une danseuse ? L’interprétation du jeune acteur incarnant Lara, Victor Polster, est tellement juste qu’il ne fait plus qu’un avec son personnage. - The Rider – Chloé Zhao
Après son très beau Les Chansons que mes frères m’ont apprises, Chloé Zhao retourne dans la réserve indienne de Pine Ridge. Cette fois-ci c’est le jeune cow-boy Brady qu’elle filme avec beaucoup de sensibilité. Sans jamais être sentimentaliste ou tire-larmes, ce film, simple et beau, nous fait plutôt chevaucher du côté du documentaire que de la fiction avec ses comédiens novices et la beauté des paysages du Dakota du Sud. A découvrir absolument (ainsi que son premier long métrage) ! - Les Chatouilles – Andréa Bescond, Eric Métayer
A 8 ans, Odette a été violée à de nombreuses reprises. Aujourd’hui adulte, elle est danseuse et son corps souffre de toute cette rage contenue. Et voilà encore un film qui gère la violence et le choc avec intelligence ! Le spectateur est en permanence à bout de souffle : suspendu aux actions de son héroïne et désireux de vengeance et de justice. Lorsque l’écran s’éteint, on est encore aux prises avec la fiction si réelle, étreint de toutes sortes d’émotions. - Une affaire de famille – Hirokazu Kore-eda
Quelle étrange famille que celle d’Osamu. Tous les six ont bien des secrets à nous faire découvrir. Avec beaucoup de finesse, Kore-eda nous fait prendre parti pour l’inattendu et l’immoralement correct. Il nous surprend avec ce superbe film sur les “invisibles” de la société nipponne, que cette Affaire de famille. Et en plus de cela, le réalisateur a bien raison : ce ne sont pas les liens du sang qui fondent une famille, c’est le choix. Une Palme d’or bien méritée !
FLOP 2018
- Diamantino – Gabriel Abrantes et Daniel Schmidt
Une étoile montante du football adulée de tous comme personnage principal d’un récit satirique sur le pouvoir, l’extrémisme et le genre ? Ca pourrait être une idée… Mais en fait, non ! Les ficelles sont grossières, l’histoire trop capillotractée, le personnage insupportable. Encore une fois, le temps est long, trop long et on ne comprend pas l’engouement critique et public pour ce film. - The House That Jack Built – Lars Von Trier
On le sait bien, Lars Von Trier veut choquer. Et bien, sur ce point, c’est réussi ! Avec son personnage misogyne et psychopathe, il lie art, religion et tuerie, et on se demande où est passée la moralité de cette création grotesque. Deux heures d’ennui à demi éveillée qui donne juste envie d’aller se recoucher et d’oublier. Encore une fois, incompréhension totale quant au succès de la sortie. - Donbass – Sergei Loznitsa
Bonne idée de critiquer la guerre au Donbass, région de l’est de l’Ukraine, en jouant sur l’exagération et l’absurde. Le réalisateur ukrainien, Sergei Loznitsa, s’est pourtant perdu en chemin. Peut-être valait-il mieux faire un documentaire ? Décidément, la satire n’est pas une réussite cette année : grotesques et lourdes, les saynètes s’enchaînent inlassablement. De pire en pire. On voudrait que ça cesse. - Mumbai Murders – Anurag Kashyap
Un serial killer sévit à Bombay, notant avec application chaque nouveau meurtre dans son petit carnet. Un jeune policier cocaïnomane devient obsédé par celui-ci. Un film indien ! Et en plus, un thriller ! Il n’en fallait pas plus pour nous donner envie d’y aller. Malheureusement, le film n’est absolument pas à la hauteur, notamment du fait de son manque de rythme et de la simplicité de l’intrigue. Les personnages ne sont pas particulièrement bien écrits (et ne parlons surtout pas des femmes). Dès le générique, l’influence des séries télévisées américaines semble un peu trop prononcée. Le film ne réussit pas vraiment à sortir de son enveloppe de bruit et de violence pour aboutir au rang de création notable. Dommage ! - Au poste ! – Quentin Dupieux
Un huis clos dans un commissariat pour un tête-à-tête entre Benoît Poelvoorde et Grégoire Ludig. Le jeu sur la temporalité, l’humour absurde et potache et puis le talent des deux acteurs auraient dû être suffisants… pour vingt minutes de film, oui. Un court métrage, ça aurait été vraiment bien. Mais non, en voici un long (1 h 13) ! Et bien, tant pis, on attendra le prochain pour un peu de renouvellement. - Ready Player One – Steven Spielberg
En 2045, l’humanité a bien réussi à détruire la planète. Pour ne plus avoir à faire face à cette horreur quotidienne, toute la planète se réfugie dans un univers virtuel : l’OASIS. Truffé de références à la pop culture (trop), un personnage principal peu intéressant (joué par Tye Sheridan), une histoire assez classique (et des facilités scénaristiques) et des scènes de bataille très très longues : le film n’est vraiment pas très convaincant. - Climax – Gaspar Noé
Une bande de séduisants danseurs. Une grosse fête. Une sangria améliorée. Mais que va t’il se passer ? Et bien, Gaspar Noé fait du Gaspar Noé ! “Ouuuuh la drogue, la mort, le sexe !!!” “Oui, et…?” En nous offrant une captation de corps dansants absolument splendide, il ne parvient absolument pas à combler le vide scénaristique et la vacuité totale de son propos (asséné à grands coups de cartons en lettres capitales). La première demie heure est visuellement fascinante mais rapidement l’ennui prend le dessus et ne nous quitte plus. Et ce n’est pas faute de rythme et d’événements choquants. Saluons tout de même la bande-annonce très réussie : https://www.youtube.com/watch?v=O7I2UZo5UfA
Marine Pallec :
TOP 2018
- Burning – Lee Chang-Dong
Le nouveau film de Lee Chang Dong est un grand moment de cinéma. Entre le thriller et la critique sociale, le réalisateur de Poetry livre une nouvelle fois ici une œuvre d’une grande maitrise, dotée d’une tonalité aussi mélancolique que brutale et portée par un trio d’acteur au sommet. Un chef-d’œuvre. - Le monde est à toi – Romain Gavras
Coke, voyous et…Mr Freeze : tel pourrait être le moto du nouveau film de Romain Gavras (Notre jour viendra). Complètement barré et servi par des acteurs au top (Adjani et Cassel en tête), Le monde est à toi est la surprise de l’année que l’on n’attendait pas. En bonus : une bande-son aussi éclectique (Laurent Voulzy, PNL, Jamie XX) qu’électrique. -
Sauvage – Camille Vidal Naquet
Portait sensible d’un jeune homme candide et désabusé dans le milieu de la prostitution masculine, Sauvage est un très beau film à la fois sur l’errance et la liberté. A voir absolument pour la performance de Félix Maritaud : nouvelle étoile montante du cinéma français. -
Les garçons sauvages – Bertrand Mandico
Exotique, androgyne, parfois un peu dégoûtant…voilà ce qui fait tout le sel de l’univers de Bertrand Mandico, auteur jusqu’ici de plusieurs courts et moyens métrages. Fable cruelle et borderline, Les garçons sauvages désarçonne et envoûte par sa fantaisie et son étrange poésie visuelle. -
The Guilty – Gustav Möller
Gustav Möller signe ici un film d’une grande maitrise et au ton prenant. Thriller entièrement tourné en en huis clos, The Guilty montre peu mais fait preuve d’une habilité narrative avec un suspense rondement mené jusqu’au dénouement final. -
Jusqu’à la garde – Xavier Legrand
Petit film dont on n’aura pas assez parlé à sa sortie, Jusqu’à la garde fait le récit glaçant d’un fait divers. Avec l’exposition de cette affaire de violence de conjugale, Xavier Legrand dresse avec énormément de justesse et de pudeur le portrait d’une famille déchirée par le drame. Bouleversant. -
Climax – Gaspar Noé
Inégal, parfois un peu surfait et avec un scénario qui tiendrait aisément sur une feuille de papier Q, le nouveau film de Gaspard Noé s’est attiré bien des critiques lors de sa sortie. Tout de même globalement moins malsain et beaucoup plus regardable que ses prédécesseurs (moins long et surtout avec un peu moins de viols et de sang), le nouveau film du réalisateur d’Irréversible fait surtout preuve d’une maestria technique folle dans ses scènes de danse pour aboutir à une expérience aussi hallucinée que jouissive.
FLOP 2018
- Fleuve noir– Erick Zonka
Catastrophe ambulante désavouée par ses propres acteurs (Sandrine Kiberlain avoua avoir détesté l’expérience du tournage), Fleuve noir est un véritable nanar, une quasi-parodie de polar qui se prend beaucoup trop au sérieux. Doté d’un récit archi-mal ficelé ainsi que d’un casting complètement en roue libre, le nouveau film d’Erick Zonka est à l’image du personnage de flic poivrot et sexiste incarné par Vincent Cassel : poussif, gênant et nauséabond. A éviter sous peine de gueule de bois. - Madame Hyde – Serge Bozon
Jésus, Marie, Joseph…parmi les 4500 films dans lesquels aura tourné Isabelle Hupert cette année celui-ci est sans doute été le pire. Malgré le numéro bien rodé de notre Zaza nationale, sur-spécialisée dans les rôles de femmes austères et névrosées, Madame Hyde ennuie profondément; la faute à un scénario d’une fadeur insipide et à une mise en scène aussi fauchée que peu inspirée. - Le goût et les couleurs – Myriam Aziza
Sorte de cousin discount de Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu (et déjà rien que ça, ça vend pas du rêve), ce petit film Netflix aurait pu passer inaperçu s’il ne souffrait pas d’une telle accumulation de clichés stupides. Tout le monde en prend pour son grade : les juifs (ahaha ces gros homophobes), les noirs (ahaha ces gros antisémites), la communauté LGBT+ (ahaha ces lesbiennes qui en fait n’attendaient que l’homme de leurs rêves) et tout cela n’est à vrai dire ni très drôle ni très intelligent. Profondément fatiguant et inutile.
- Venom – Ruben Fleischer
Laid et stupide à mourir. Sony, please make it stop, arrêtez vos conneries et vendez vos droits à Marvel svp. Merci. Bisous. - Solo – Ron Howard
Pour citer une rengaine populaire des ondes FM : « Et puis à quoi bon? […]. Tu penses à c’que vont penser les gens. Mais tu les laisses tous indifférents. […]. Tout le monde, il veut seulement la thune (tout le monde il veut seulement la thune). »…Bref, arrêtez de tuer mon enfance Disney svp. Merci. Bisous. - Katie Says Goodbye – Wayne Roberts
Petit film indépendant assez peu remarquable sur la forme, Katie Says Goodbye se détache cependant du lot avec son ton profondément masochiste et sa morale douteuse : tu peux te faire frapper, piller, violer mais si tu arrives à relever la tête et à sourire tout ira bien YOLO ! Pour sadiques ou maso-dépressifs only. - Phantom Threads – Paul Thomas Anderson
Triste déception que ce nouveau Paul Thomas Anderson qui s’avère d’un ennui colossal. Très beau esthétiquement (à l’image de ses costumes) mais totalement vide de substance sur le fond et handicapé par une bande-son envahissante, Phantom Thread n’était hélas pas à la hauteur du chef-d’œuvre tant attendu.
Clémence Letort-Lipszyc :
TOP 2018
- Jusqu’a la garde – Xavier Legrand
On vit le quotidien, les angoisses, les interrogations d’un jeune garçon prisonnier du divorce de ses parents avec beaucoup de pudeur et une vraisemblance absolument glaçante. Le jeune acteur est formidable aux côtés de Léa Drucker et Denis Menochet, mais le vrai personnage ne se dévoile jamais réellement et pourtant poursuit l’enfant et nous hante. La violence et les non-dits s’installent, la tension monte dès le début, elle ne nous quitte jamais, on retient son souffle jusqu’à la dernière seconde. - Les chatouilles – Andrea Bescond et Eric Métayer
La mise en scène est superbe. La réalisatrice oscille entre scène de danses et scènes chez la psy s’entremêlant à son passé et son présent. Les violences que le personnage a subi sont libérées à travers la poésie qui émane des mouvements du corps de l’actrice. Une justesse dans le jeu et une vérité dans les propos qui font de ce spectacle de danse adapté à l’écran un des incontournables de cette année. - Une affaire de famille – Hirokazu Kore-Eda
Avec l’émotion et la délicatesse qu’on lui connaît, Kore-Eda signe un film sur l’amour et la survie. Un film où les liens du cœur sont plus forts que les liens du sang. Toute la chaleur de la sphère familiale émane de ces six âmes unies et réchauffe notre cœur. Une belle palme d’or, émouvante et sincère. - Leave no trace – Debra Granik
Au delà de la fable écologique et sociétale des temps modernes, le film dévoile avec pureté et noblesse l’amour inconditionnel entre un père et sa fille. Leave no trace est une bouffée d’air, une parenthèse poétique dans le cinéma américain contemporain. - Dogman – Matteo Garrone
Portrait attachant d’un petit commerçant qui tente de s’affirmer dans un patelin où règne des petites frappes. Le réalisateur associe avec justesse son courage, ses confrontations où il ressort souvent perdant et son rôle de père aimant. L’acteur principal est remarquable et a d’ailleurs a été récompensé à Cannes. - Dans la brume – Daniel Roby
Un film de science-fiction au postulat assez étrange qui nous plonge dans une atmosphère anxiogène. Certes le film n’est pas innovant face aux codes du genre, mais la plasticité et la relation entre les personnages nous entrainent dans un compte à rebours essentiel à l’action et mené avec brio du début à la fin. - Hostiles – Scott Cooper
La vengeance d’une femme et le devoir d’un homme nous emmènent à travers une Amérique sauvage. Leur voyage placé sous le signe de la colère, de la violence reflète peu à peu l’humanité qui existe en chacun d’entre nous. Force de l’écriture des personnages, beauté visuelle et ambiance remarquable, Hostiles est un western poignant.
FLOP 2018
- Un amour impossible – Catherine Corsini
Une histoire d’amour tire-larme qui représente la passion féminine dont le symptôme premier est l’aveuglement et la soumission. Une proposition archaïque qui tente d’être contrée par la force d’une mère célibataire qui élève seule sa fille. On n’atteint le sommet du ridicule et de l’apitoiement lors de la dernière séquence. - Lola et ses frères – Jean-Paul Rouve
Quatrième film de Jean-Paul Rouve sur une fratrie plus ou moins soudée. Pleins de bons sentiments et surtout pleins de clichés, le film est rarement drôle mais souvent agaçant dans sa miellerie. - Le Grand Jeu – Aron Sorkin
Un montage hystérique, un personnage peut empathique et une logorrhée infernale : à quel moment le spectateur a-t-il le droit de respirer ? Jamais me dit-on dans l’oreillette. Un film boulimique de son et d’image qui dessert finalement amplement son histoire, on en ressort exténué. - Come As You Are – Desiree Akhavan
Cette dénonciation des « camps de reconversion » pour jeunes homosexuels ne réussit pas à transmettre les conflits intérieurs de ses personnages. Le traitement est certes pudique mais la distance mise entre les protagonistes et l’œil du spectateur est trop grande pour qu’on s’intéresse réellement à leur sort. - Les filles du Soleil – Eva Husson
Un voyage au cœur du combat des femmes kurdes qui saura ravir notre appétit pour les beaux films plastiques et nous faire couler des larmes de sang devant tant de mauvais choix narratifs (flashbacks à tour de bras) et de scènes plus lacrymales que l’épluchage d’un oignon. - Millenium : Ce qui ne me tue pas – Fede Alvarez
Première adaptation cinématographique de la saga que je découvre. Il y a de jolis plans, de belles voitures, mais concrètement le jeu est caricatural, pas souvent juste, et ce n’est pas parce qu’on court vite que le spectateur ne va pas s’ennuyer. Le film m’a au moins donné envie de voir les autres adaptations pour oublier celle-ci. - Les Frères Sisters – Jacques Audiard
Plus qu’un membre du flop, il s’agit d’une déception. Tout était là pour un cocktail explosif : le réal, les acteurs et la maîtrise de leur art, une histoire engageante et une image époustouflante. Mais ce mélange d’élément parfait, pour une raison qui m’a foi m’échappe, n’a créé aucun attachement ni intérêt pour ce qui se passait à l’écran. Un film que j’aurais aimé aimer.
J. Benoist
TOP 2018
- The Rider – Chloé Zhao
Un rythme lent, justifié par le thème du film, la ténacité sans espoir et bouleversante du personnage principal. De la mise en scène de son destin cruel ressort une douceur qui tient tout à la fois des acteurs, de la place laissée au silence et de la beauté froide des paysages. - Sans un bruit – John Krasinski
Ce film d’épouvante parvient à son but grâce à sa gestion habile du rythme et du suspense. Un film réussi dans son genre mais qui aurait gagné à pousser l’originalité plus loin. - Phantom Thread – Paul Thomas Anderson
La forme épouse le sujet du film, rapprochant de manière troublante le cinéaste et son personnage : c’est symétrique, ordonné, maîtrisé, tout comme le quotidien du personnage principal. Le couple Woodcock-Alma ouvre une réflexion entêtante sur les relations de pouvoir et la place que l’abandon peut y tenir. - Hostiles – Scott Cooper
Un western qui ne révolutionne pas le genre mais à la mise en scène efficace, où la pertinence des cadrages s’allie à un montage intelligent. Le scénario est toutefois trop didactique : à trop vouloir nous montrer la violence imparable du grand ouest, les scénaristes oublient de travailler leurs personnages, dont l’évolution semble forcée. - L’île aux chiens – Wes Anderson
Quand Wes Anderson fait du Wes Anderson, ça fonctionne. Difficile de ne pas aimer son nouveau film quand on a aimé Fantastic Mr Fox : même animation et même humour. Un film plaisant mais qui manque de prise de risque. - Moi, Tonya – Craig Gillespie
Un film dont le principal parti-pris est de briser le quatrième mur, un choix pertinent pour un biopic qui se moque dès le premier carton de la formule affectionnée par le genre, « d’après une histoire vraie ». Les multiples adresses aux spectateurs et points de vue apportent humour et dynamisme à une histoire qui finit toutefois par virer à la caricature.
FLOP 2018
- Les Indestructibles 2 – Brad Bird
Une suite qui souffre d’un scénario superficiel et qui, en voulant surfer sur le premier opus, ne fait qu’effleurer les bonnes idées sans les creuser. On préférera Miraï, ma petite soeur, de Mamoru Hosoda. - Deadpool 2 – David Leitch
Ne ressort de ce film qu’une bouillie d’humour pipi-caca-sexe et de références jetées jusqu’à l’écoeurement. - Under the Silver Lake – David Robert Mitchell
Un film surréaliste et cauchemardesque abondant de références pop et cinématographiques. En le regardant, je me suis désagréablement sentie comme le personnage principal, farfouillant entre les lignes pour y trouver un sens caché sans bien savoir s’il y en avait vraiment un. - Annihilation – Alex Garland
Un film de science-fiction qui ne trouve pas quel ton emprunter, oscillant entre épouvante et métaphysique sans arriver à les mêler. Peu habile à philosopher – ce qu’il semble pourtant avoir la prétention de faire – , Annihilation m’a laissée bien perplexe. - Ready Player One – Steven Spielberg
L’intérêt de Ready Player One repose sur son visuel et ses multiples références à la culture geek. Or, l’univers en image de synthèse n’a rien de novateur et, si l’on n’est pas adepte de pop culture, rien ne vient relever la fadeur du scénario. On préfèrera un bon jeu vidéo. - Black Panther – Ryan Coogler
Un film de super-héros honorable mais sans originalité : Black Panther est un Marvel de plus, au scénario, au visuel et à l’humour téléphonés. S’il est bien le premier film de l’univers MCU à avoir pour personnage principal un super-héros de couleur noire, on lui préfèrera Spider-Man : New generation de Persichetti, Ramsey et Rodney Rothman.
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