Ce vendredi, nous vous parlons de : La Mule, Continuer et Alien Crystal Palace.
La Mule : Earl Stone est horticulteur. Il a dédié toute sa vie, tout son amour à ses fleurs au dépend de sa famille. Avec l’arrivée d’internet et de la vente en ligne, sont affaire fait faillite. À la rue du jour au lendemain, Earl s’essaie au poste de mule pour les cartels mexicains. La course d’un jour, va devenir son job à temps plein.
Onze ans après Gran Torino, Clint Eastwood reprend les reines devant et derrière sa caméra. Le coup de vieux se fait sentir, mais le rôle lui va comme un gant. Ce vieux monsieur nous est sympathique sans sombrer dans le pathétique. Les livraisons du cartel rythme le film, elle se veulent de plus en plus tendue, mais inversement, le personnage de Earl semble s’y accoutumer. De ses frémissements à la découverte de la première enveloppe de cash, il en vient à rembarrer fissa le jeune caïd envoyé par le patron pour le superviser : « J’ai fait la guerre petit, tu ne m’impressionnes pas ! ». Sans une démonstration outrancière des rapports de force, la personnalité, l’aplomb l’emporte. Il ne s’agit plus du personnage de vieux bougon de Gran Torino, mais de l’ambition d’un homme de retrouver une vie de famille qui s’effrite. Car la famille, Earl ne fera que le répéter, c’est ce qu’il y a de plus important. Une morale peut être trop présente qui n’a pas besoin d’être prononcée pour que le message nous parvienne. Les attentions, les regards que ce vieux monsieur échange avec son entourage, sont emplis d’un sens qui résonne universellement. Et c’est pour ça que le film fonctionne. L’écho de la solidarité et de l’amour résonne et nous emmène dans les traces de cet homme-mule hors du commun.
Tirée d’une histoire vraie, cette fable sur la rédemption est sans surprise mais offre un beau moment de cinéma, maîtrisé de bout en bout. C.L.L.
Continuer : Après trois beaux films qui ont marqué les esprits : À perdre la raison (2012), Les Chevaliers blancs (2015) et L’économie du couple (2016), Joachim Lafosse met en scène Virginie Efira et Kacey Mottet Klein dans un désert sans fin. Sybille et son fils, qui la déteste, traversent les terres rocailleuses du Kirghizistan. Jeune homme véhément, Samuel ne veut pas être là. Sybille, elle souhaite seulement reconnecter avec un fils qu’elle n’a jamais vraiment connu. Ces retrouvailles à dos de chevaux vont permettre aux tensions de s’effacer — peut-être trop rapidement. Alors que la violence de l’enfant explose sur la mère avec rage, le vent se calme et ils apprennent à vivre dans un semblant d’harmonie. Le voyage pénible, mais beau, ainsi que la solitude, leur donne l’opportunité de se découvrir. À presque aucun moment, le cinéaste ne quitte des yeux ses personnages, malgré la beauté du paysage, malgré les montagnes, les fleuves et le ciel, malgré tout cela, presque aucun plan n’est sans Sybille et Samuel. Entièrement concentré sur cette femme et ce jeune homme, dont nous ne connaissons que des bribes de leurs passés. Le lien qui les unit est plus fort que tout. Cependant, le film pose problème par moment : certaines scènes sont étranges et cassent le rythme du récit sans rien y apporter. Cela a pour conséquence de parfois nous lasser. Enfin, la réconciliation, aussi rapide qu’expéditive, nuit à l’histoire. Mais en dépit de tous ces défauts, le long-métrage montre une belle relation d’un fils et de sa mère. Les deux acteur(trice)s sont magnifiques et pleins de tension, ce qui rend le film vivant. Profondément vibrant. Ainsi que le souffle du vent qui vient fouetter le paysage. Joachim Lafosse n’arrive pas à gérer le rythme et le récit comme il a su si bien le faire dans À perdre la raison, mais il livre encore une fois une œuvre forte et intense. M.M.
Alien Crystal Palace : Comme il est normalement d’usage dans ce genre d’exercice, nous devrions entamer cette critique par un court résumé du film dont il est ici question. Toutefois, il arrive que la meilleure volonté du monde se heurte parfois à un obstacle et, en l’occurrence, à un objet si absurde qu’il en vient à déjouer tous les mécanismes de la pensée cartésienne.
De toute façon, il serait sans doute assez juste de spéculer que le scénario de cet incroyable bordel importait relativement peu à ses auteurs. Né entre-autres de l’imagination fortement altérée de Nicolas Ker (ici également « acteur » principal) – et sans doute gribouillé après une partie de kamoulox et durant une monstrueuse gueule de bois – Alien Crystal Palace surfe (ou du moins tangue) allègrement entre meurtres, érotisme à deux balles et pseudo complot raëlien. Réalisé à la manière de ce petit court-métrage que vous aviez fait avec vos copains en Seconde dans le garage de votre papa, le cadrage et montage y sont approximatifs, l’esthétique – digne des meilleurs téléfilms des 90’s – pour le moins déroutante… Quant au jeu de Nicolas Ker, disons simplement qu’entre sa diction sibylline et son état d’ébriété permanente, les adjectifs manquent pour rendre compte avec justesse de l’étrangeté de la chose.
Mais au fond me direz-vous, pourquoi s’enquiquiner à parler de cette improbable série Z ? Certes, l’étrangeté globale du machin et la hype d’Arielle Dombasle pousseront certainement quelques titres bobos à crier au génie et à ériger ce détonant gloubi-boulga sur l’autel du film culte. Certes, Alien Crystal Palace demeure tout à fait divertissant et hilarant au huitième degré. Mais vient quand même un certain malaise lorsqu’on en vient à réfléchir deux secondes aux raisons qui ont permis la conception et la sortie en salles de ce qui reste, réduite à son plus simple appareil, une énorme daube.
Ainsi, il faudra bien constater que là où de nombreux réalisateurs et scénaristes galèreront de nombreuses années pour parvenir ne serait-ce qu’à monter un court-métrage pour lequel ils seront rémunéré avec des fonds de tiroirs, il aura certainement suffi de deux/trois coups de fil à Arielle Dombasle pour convaincre quelques-uns de ses copains producteurs d’investir dans son incroyable délire nanardesque. Idem pour le casting où l’on retrouvera entre-autres la présence d’Asia Argento, Chritian Louboutin et de Jean-Pierre Léaud.
Parce que le constat est là : Malgré son ton globalement sans queue ni tête, s’il y a bien une chose que parvient à prouver Alien Crystal Palace, c’est à quel point notre cher cinéma français se résume tout simplement parfois ni plus ni moins à une brillante affaire de népotisme. M.P.
Marine Moutot, Clémence Letort-Lipszyc et Marine Pallec
La Mule
Réalisé par Clint Eastwood
Avec Clint Eastwood, Bradley Cooper, Laurence Fishburne
Drame, Biopic, États-Unis, 1h56
16 janvier 2019
Continuer
Réalisé par Joachim Lafosse
Avec Virginie Efira, Kacey Mottet Klein, Diego Martín
Drame, Aventure, Belgique, France, 1h23
16 janvier 2019
Alien Crystal Palace
Réalisé par Arielle Dombasle
Avec Arielle Dombasle, Nicolas Ker, Asia Argento
Thriller, France, 1h37
23 janvier 2019