Un film crépusculaire ?
Avant de parler du dernier film de la saga Marvel, un petit point histoire.
Tout d’abord si vous n’avez pas vu Avenger : Infinity War, je vous conseille fortement de le regarder avant au risque de ne pas comprendre grand-chose. Le coup de force de Marvel — et par extension de Disney qui a racheté le studio fin 2009 — est d’avoir réussi à créer un univers titanesque en 22 films interconnectés et une multitude de héro.ïne.s qui rapporte des millions de dollars au box-office.* Évidemment, nul besoin de voir tous les films pour saisir ce qui se passe ici, bien que vous aurez plus d’affinités et comprendrez sans doute mieux les inside jokes ainsi que vous vous repérez davantage dans la foule de personnages secondaires, en plus des personnages principaux.
Arrêtez de lire ces lignes si vous n’avez pas vu Infinity War, il va y avoir du spoiler. Dans le précédent film, les superhéro.ïne.s Marvel jouait le destin de la moitié de l’univers en essayant de combattre Thanos qui, pendant ce temps, récupérait une à une les pierres d’Infinité (Infinity Stones). Une fois en possession des six pierres, il pourrait, en un claquement de doigts, réduire à néant la moitié de l’univers. Et roulement de tambour, c’est ce qui se passe à la fin d’Infinity War. Dans une scène qui semble irréaliste pour la plupart des fans de Marvel, la moitié des héros disparaissent — à noter au passage que les héros « historiques » restent : Captain America, Black Widow, Iron Man, Thor, Hulk. Mais voici que partent en poussière : Spider-man, Doctor Strange, Black Panther, Star-Lord, Drax et même Fury. Vous n’imaginez même pas le silence dans la salle. Voire la plupart des héros, nouvellement installés partir en fumée, c’est un coup de génie. Personne n’aurait pensé cela de la part de la grosse machine de production tel que Marvel Studio. Pourtant ils l’ont fait et notons au passage que cela a marché. Le film a battu des records de fréquentation, qu’est en train de battre le nouveau long-métrage. Alors que beaucoup de gens spéculaient que le genre faiblirait après 10 ans à proposer entre 4 à 5 films par an, la saga Marvel continue de rassembler les spectateur.trice.s dans les salles obscures — DC Comics essaye également de suivre la cadence et d’autres univers existent et qui ne sont pas liés aux Avengers, tels que X-Men ou Deadpool. Dans Avengers : Endgame, il s’agit donc pour les superhéro.ïne.s de faire revenir la moitié de l’univers partie en fumée.
Ce nouveau long-métrage, plutôt que de se lancer dans une course effrénée dans la surenchère d’actions et d’effets spéciaux, décide de calmer le jeu et de montrer des superhéros sans but, qui semblent perdus entre un fort sentiment de culpabilité et le désespoir. Sur les trois heures, le film est réparti plus ou moins également entre le deuil et la stupeur, la recherche pour inverser le cours du temps et les combats pour lutter pour la sauvegarde de l’humanité et de l’univers. Les vingt-deux films sont cités et respectés. C’est un véritable mausolée à la gloire des superhéros Marvel qui se dresse devant nous. Un peu plus lent que les précédents, le récit installe une réelle nostalgie et réutilise tous les codes du genre, mais en les détournant. Qu’importe la fin du film, le spectateur sent que l’atmosphère générale est à la tristesse et au regret. Un état très étrange pour un genre qui connaît ses lettres de noblesse. Bien évidemment, la marque de fabrique de Marvel étant l’humour — pour lequel ils se sont maintes fois montrés plus capables que leur concurrent DC Comics. Ici, le film n’échappe pas à la règle et entre un petit moment nostalgie, une petite touche d’humour. Mais cette fois, ce n’est pas l’humour cynique d’Iron Man, mais celui de Thor — peu épargné dans le film — et Rocket, le raton laveur parlant. Beaucoup de personnages demeurent en retrait, par exemple Captain Marvel dont on pouvait penser qu’un rôle plus important lui incomberait. Nous restons centrés sur les superhéros des débuts : Iron Man, Hulk, Captain America, Black Widow, Hawkeye, War Machine, mais également Rocket, Nebula et Ant-Man. Mais ne vous attendez pas à que l’on s’épanche sur la perte de chaque personnage, car tous les héro.ïne.s emblématiques reviendront dans cet épisode-fleuve. Il s’agit presque d’un album de famille. Cela alourdit la narration qui essaye sans cesse d’intégrer tout le monde. Les clins d’œil ne manqueront pas et raviront les fans de la première heure, tandis que les autres n’y verront rien de particulier. Un bon film d’action dans l’ensemble avec peut-être un peu trop de séquences larmoyantes. Malgré tout, cela reste intéressant et atteste bien que l’époque évolue. Fini les superhéros qui ne montraient pas leurs émotions. Attention spoiler : Steve Rogers et Tony Stark pleurent et il y a beaucoup de passages où les personnages se font des câlins, tellement ils sont heureu.se.s de se retrouver. Ainsi, le film est touchant et mêle avec plus ou moins de subtilité action et moment de recueillement. Il reste malgré tout inégal tant dans sa mise en scène que dans son scénario qui essaye de rassembler tout le monde. Pourtant vous n’êtes pas au bout de vos surprises avec ce nouvel opus qui a réussi à garder ses secrets intacts tant dans sa promotion, que dans le casting. Je ne vous en dirais donc pas plus.
Tandis que les nouvelles sorties s’annoncent : Spider-man : Far from Home (3 juillet 2019), Black Widow, Docteur Strange sont prévus en 2020, Black Panther 2 en 2021, Les Gardiens de la Galaxie vol. 3 en 2022, qu’en est-il des « anciens » ? Ceux de la première heure. Les spectateurs et les studios cherchent-ils à renouveler un genre en proposant plus de personnages, de la chair fraîche ? C’est sans doute le cas pour les Studios Marvel qui n’en finiront pas de nous surprendre.
P.S : Il n’y a pas de scène à la fin du générique. Une première depuis le début de la saga qui annonçait toujours le prochain ou en tout cas, mettait en scène les personnages ensemble. Ici rien de tel. Preuve qu’il s’agit bien de la fin d’une ère, celle des Avengers et de la plus grosse saga de tous les temps. Cet Avengers : Endgames, serait-il le film crépusculaire du genre superhéroïque ?
Marine Moutot
Notes :
* Pour information, le premier Iron Man sorti en 2008 a remporté dans le monde : 585 174 222 $. Le premier Avengers sorti quatre ans plus tard ramène à l’international : 1 518 812 988 $. Soit un milliard de plus qu’Iron Man. Il est encore trop tôt pour le nouvel opus d’Avengers de dire combien il remportera, mais il est déjà en train de battre des records. Avengers : Infinity War avait rapporté : 2 048 359 754 $. (Source : Box Office Mojo)
Avengers : Endgame
Réalisé par Joe Russo, Anthony Russo
Avec Robert Downey Jr., Chris Evans, Mark Ruffalo, Scarlett Johansson, Chris Hemsworth, Karen Gillan, Don Cheadle, Paul Rudd, Brie Larson
Action, Superhéroïque, Drame, États-Unis, 3h03
24 avril 2019
Un avis sur « [CRITIQUE] Avengers : Endgame et l’univers de Marvel »