Cette semaine dans les Conseils : J’accuse, Little Joe et Pères et impairs.
J’accuse : Le 5 janvier 1895, le jeune officier Alfred Dreyfus est dégradé et envoyé sur l’île du Diable pour avoir espionné pour le compte de l’Allemagne. Georges Picquart qui a suivi l’affaire de près est promu à la tête du contre-espionnage. Il découvre alors un monde de mensonges et de secrets et doit faire face à ses désillusions.
Alors que le cinéaste vient une nouvelle fois d’être accusé de viol par la photographe Valentine Monnier dans Le Parisien, il est aujourd’hui difficile de donner un avis objectif sur J’Accuse sans parler de la polémique : est-il possible de séparer l’homme de l’œuvre ? Dans les deux cas, cela fait partie d’une position propre à chacun.e qui juge avec ses convictions cette affaire. Le film étant exceptionnel par son récit et la force de sa réalisation, j’ai fait le choix de vous apporter quelques éléments critiques lors de cette sortie nationale. Libre à vous de lire notre critique complète du film que nous avions faite à la Mostra en septembre.
La reconstitution historique est une part conséquente du long-métrage, mais le scénario dépasse son sujet pour lui donner une portée plus grande et plus profonde : racisme, antisémitisme, protection de la hiérarchie, hypocrisie de l’Armée. Cette histoire a provoqué d’importants changements dans la société française et a défrayé la chronique pendant 12 ans. Le spectateur suit et ressent le malaise du Général Picquart qui semble être tombé dans un traquenard. Mais cette tension, parfois très proche du thriller, qui aurait pu épuiser le public à la longue, déjà éprouvé par un sujet sensible et qui résonne fortement avec l’ambiance actuelle xénophobe de la société française, est contrebalancée par l’humour, si cher au cinéaste polonais.
À ceux et celles qui souhaitent le boycotter, je soutiens ce choix fort à la portée politique pour un changement, espérons-le, en profondeur dans le cinéma français. À ceux et celles qui souhaitent le voir, je les comprends, car l’œuvre est tellement puissante qu’elle peut vivre par elle-même. M.M
Pour aller plus loin :
L’émission de France Culture autour de l’affaire Roman Polanski, peut-être un peu trop consensuelle : ici.
L’article de Médipart autour des violences sexuelles dont est accusé Roman Polanski : ici.
Little Joe : Brillante phytogénéticienne, Alice développe une nouvelle variété de plante – Little Joe – capable de rendre heureux.
Petit outsider de la dernière sélection officielle du Festival de Cannes et lauréat du Prix d’interprétation féminine, Little Joe s’ouvre sur une intrigante prémisse (celle du bonheur préfabriqué, entremêlé avec entre autres les affres de la maternité) qui, si elle avait été rondement menée, aurait pu aboutir à une œuvre tout à fait fascinante. Hélas, Little Joe — qui honnêtement aurait davantage mérité sa place en sélection parallèle — a malheureusement tout du film concept et déçoit par son exécution. Malgré une introduction plutôt réussie, l’œuvre lasse rapidement par son ascétisme ambiant (décors minimaux, trame répétitive, jeu d’acteur en sous-régime) seulement bousculé par un insupportable gimmick musical (amateurs de kabuki, ce film est fait pour vous). En se contentant de gratter la surface de son sujet sans jamais pousser sa réflexion en profondeur, le film de la cinéaste autrichienne Jessica Hausner traîne, hélas en longueur jusqu’à s’essouffler péniblement. M.P
Pères et impairs : Être père ce n’est pas toujours facile. Certains sont absents, d’autres maladroits, d’autres encore un peu à côté de la plaque. Mais ce qui compte surtout c’est d’être sincère dans sa relation à l’autre.
Le nouveau programme automnal de courts métrage concocté par l’Agence du court métrage est arrivé. Et c’est très réussi ! Après Plongeons ! l’an dernier, un nouveau panorama d’un motif, ou plutôt d’une figure cette fois-ci : le père dans toute sa splendeur. Jeune supporter de l’équipe de foot britannique, ado un peu rebelle saoulée par la séparation de ses parents, jeune homme tentant de soigner son père aux aspirations un peu étranges, les courts métrages mettent en valeur les enfants de ces pères. Autant de portraits de pater familias que de situation, alors il y a de quoi faire ! Animation 2D et documentaire, prise de vue réelle et comédie, animation 3D et comédie, la variété des techniques fait plaisir à voir. Et le meilleur ? C’est que, même quand on ne s’y attend pas, c’est drôle et touchant. Coup de coeur particulier, à cet égard, pour le dernier film, Little clumsy acts of tenderness de la réalisatrice finlandaise, Miaa Tervo. Alors surtout ne ratez pas cette belle découverte en salles (uniquement au Studio des Ursulines pour la région parisienne) ! M.K.
Cinq ans après la guerre de Samuel Albaric, Martin Wiklund et Ulysse Lefort
Coach de Ben Adler
Un jour au parc de Diego Porral
Je sors acheter des cigarettes d’Osman Cerfon
Chien bleu de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh
Little clumsy acts of tenderness de Miaa Tervo
Manon Koken, Marine Moutot et Marine Pallec
J’accuse
Réalisé par Roman Polanski
Avec Jean Dujardin, Louis Garrel, Emmanuelle Seigner
Drame, Histoire, Thriller, France, 2h12
13 novembre 2019
Gaumont Distribution
Little Joe
Réalisé par Jessica Hausner
Avec Emily Beecham, Ben Wishaw, Kit Connor
Science-Fiction, Autriche/Allemagne/Royaume-Uni, 1h40
13 novembre 2019
BAC Films
Pères et impairs
Plusieurs réalisateurs
Programme de 6 courts métrages (prise de vue réelle et animation)
Comédie, Drame, Documentaire, Etats-Unis, 1h15, à partir de 13-14 ans
13 novembre 2019
L’Agence du court métrage