[CRITIQUE] His Dark Materials – Saison 1 Episode 1

Dans un monde parallèle au nôtre, où chaque être humain est lié à un être à forme animale nommé daemon, Lyra (Dafne Keen) vit au milieu des érudits du Jordan College, à Oxford. Rêvant d’explorer le Grand Nord avec son oncle Lord Asriel (James McAvoy), elle parcourt les couloirs et les toits de la ville en compagnie du garçon de cuisine Roger (Lewin Lloyd) et des gitans. Deux compagnons de jeux qui disparaissent bientôt, enlevés par les mystérieux “Enfourneurs”. Lord Asriel revient alors à Jordan College, non pas pour emmener la jeune fille mais pour dévoiler sa nouvelle découverte, des photographies de la Poussière, particule mystérieuse attirée par les adultes, qui révèlent une ville appartenant à un monde parallèle. Après avoir tenté d’empoisonner l’explorateur, le Maître de Jordan College remet à Lyra l’Aléthiomètre, une boussole indiquant “la vérité”, avant de confier l’enfant à la belle Madame Coulter. Lyra ne sait pas encore que tous ces événements sont liés et la conduiront vers le Grand Nord. 

Depuis le 5 novembre, OCS diffuse la série His Dark Materials, une coproduction de HBO et de la BBC. Il s’agit d’une nouvelle adaptation de la trilogie À la croisée des mondes de Philip Pullman, réputée inadaptable de par la densité de ses thèmes et l’inventivité de son univers. New Line Cinema s’était déjà cassée les dents en 2007 avec un long métrage adapté du premier tome, À la croisée des mondes : La Boussole d’or.

On ne peut reprocher au premier épisode de His Dark Materials de ne pas être fidèle au roman de Philip Pullman. Le personnage de Lyra y est une jeune fille pleine d’énergie et d’insolence, modèle plus attrayant que la version sage de l’adaptation de 2007. Le scénario ainsi que les plans en caméra portée, proches des visages, ou dans des salles bondées, portent une attention particulière à certains personnages. Dès la première scène, quand Lord Asriel confie Lyra bébé aux érudits, la figure paternelle jouée par James McAvoy est mise en avant. L’amitié avec le garçon de cuisine, Roger, est également bien dessinée, avec une scène de jeu dans les couloirs et la crypte de Jordan College puis de confidences dans la chambre de Lyra.

Et les autres personnages ? Billy Costa, que Lyra connaît bien si l’on en croit les dialogues, ne partage aucune scène avec la jeune fille. C’est là que le bas blesse :  le premier épisode se concentre seulement sur les personnages et éléments qui serviront l’intrigue future. Il affiche clairement son ambition d’adapter toute la saga en insistant sur le Magistère et sur des personnages qui ne gagnent en importance qu’au fil des tomes, semblant marcher sur des oeufs pour ne pas être accusé de faire les mêmes erreurs que le film, mais omet de prendre le temps de développer son univers. Cela donne un épisode trop précipité et bavard, qui oublie la règle du “Show, don’t tell”, littéralement “Montre le, ne le dis pas”, pourtant le b.a.-ba de l’écriture telle qu’elle est enseignée aux Etats-Unis.

Tout comme Harry Potter de J.K. Rowling, succès qui lui est contemporain, ainsi que bien des ouvrages appartenant au genre de la fantasy, une des qualités du roman de Philip Pullman est la force évocatrice de ses descriptions. Malgré ses défauts, le film de 2007 avait tenté de recréer un univers inspiré du steampunk, aux couleurs chaudes, avant de passer au monde froid et bleuté du Grand Nord et des expériences scientifiques glaçantes qui y sont conduites. Enfant, je rêvais davantage d’avoir un daemon et d’ouvrir des portes entre les mondes que d’entrer à Poudlard. Mais point de cette magie dans le premier épisode de His Dark Materials. Les daemons prennent peu de place à l’écran et sont peu bavards. Peut-être parce que chaque plan rapproché de Pantalaimon, le daemon de Lyra, ou de la panthère de Lord Asriel, est plutôt malaisant, image de synthèse oblige. Jordan College, malgré une scène de déambulation sur les toits, dans les couloirs et les cuisines, est également à peine esquissé.

On pourrait tenter d’y voir une volonté de s’éloigner de Harry Potter. Surfer sur le côté sombre de Game of Thrones (qui a pourtant peu à voir) ? Oui, mais. Même le grand rêve de Lyra est à peine évoqué, si ce n’est par les dialogues qui répètent à l’envie qu’elle veut absolument partir explorer le Grand Nord. Hormis un dessin et quelques posters sur les murs de sa chambre, rien ne montre cette passion. Idem des “Enfourneurs”, légendes urbaines qui effraient les enfants, pourtant propices à de belles mises en image des récits qu’ils se racontent pour se faire peur et de scènes de complicité (entre Billy Costa, Roger et Lyra, par exemple). Le rite de passage des gitans, non présent dans le livre, par exemple, est un ajout intéressant, qui donne une idée du potentiel de la série, si scénariste et réalisateurs prennent le temps de développer davantage l’univers et les personnages secondaires.

Le premier épisode annonce une série scénaristiquement fidèle mais maladroite, précipitée et cinématographiquement passable. La suite me donnera-t-elle tort ?

J. Benoist

His Dark Materials – Episode 1 : Jordan collège (Lyra’s Jordan)
Scénario de Jack Thorne
Réalisé par Tom Hooper
Avec Dafne Keen, Ruth Wilson, Anne-Marie Duff, James McAvoy
Coproduction BBC Studios, Bad Wolf, New Line Cinema, HBO
Diffusion en France par OCS
Aventure, Fantastique, 60 minutes
États-Unis, Royaume-Uni, 2019


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Publié par Phantasmagory

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