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Il n’est pas nécessaire de rappeler à quel point cette année 2020 est particulière pour notre société. La crise du coronavirus, qui a frappé le monde entier, a empêché un grand nombre d’événements culturels de se tenir. Le Champs-Élysées Film Festival a lieu depuis 9 ans sur l’une des plus belles avenues cinématographiques du monde et met à l’honneur des films indépendants américains et français. Pour la première fois, le festival se tient en ligne dans une version totalement gratuite et accessible au plus grand nombre.
Pour ce troisième jour du festival, une programmation plus féminine et plus orientée vers l’univers artistique dès 18h avec le documentaire de la plasticienne française Alexandra Pianelli, Le Kiosque, et le film de Joe Denardo et Paul Felten, Slow Machine, sur une actrice qui se cherche. À 19h, c’était le moment musique avec le showcase de l’artiste P.R2B – nous n’avons malheureusement pas pu y assister, mais le concert est disponible en replay. Une journée un peu moins convaincante pour nos rédactrices mais vivement la suite !
Critique
Pour échapper à une relation passée, Stéphanie, actrice, se fait passer pour Danielle et se retranche à la campagne, avec un groupe de musiciens qu’elle ne connaît pas.
Le début de Slow Machine intrigue. L’utilisation de la pellicule 16mm, devenue rare, retient notre attention. La situation opaque que tente de fuir un personnage principal mystérieux, introduite in medias res, capte notre intérêt. La construction en flash-backs entretient le suspense : avec un tel montage, on attend la surprise et le drame. D’autant que le synopsis nous annonçait que Stéphanie “fini[rait] par craquer, obligée de faire face aux conséquences de sa rencontre avec Gérard”.
Mais non. On attend un craquage qui ne vient jamais. Le personnage principal n’évolue pas et, lorsque le drame finit par être révélé, on est un peu déçue, la résolution était courue d’avance. Peut-être le sujet des cinéastes était-il l’état de détresse d’une criminelle ? Si tel est le cas, le spectateur ne dispose des clefs de lecture que bien trop tard.
L’absurde qui s’introduit dans le récit – la scène de l’audition, la rencontre avec l’agent immobilier, le jeu sur les identités – est la véritable audace du film. Mais il intervient trop ponctuellement, dans des scènes aléatoires au milieu d’une succession de situations manquant de liant. Le long-métrage de Paul Felten et Joe Denardo ne va jamais au bout de sa proposition. De même avec le style un peu arty – flash-backs mystérieux, grain de la pellicule -, qui semble un plaisir vain des cinéastes et n’entre jamais au service du film. Tout cela est trop déconstruit et manque d’unité. Le film se perd et nous perd. On n’en saisit pas le propos.
Les cinéastes en semblent conscients. L’histoire racontée à la petite fille dans la dernière séquence, nouvelle allégorie dont on ne comprend pas le sens, sonne comme un aveu : “je ne voyais pas très bien où tu allais”, déclare le père, comme soulagé qu’elle s’arrête.
Johanna Benoist
Slow Machine
Réalisé par Paul Felten et Joe Denardo
Drame, USA, 2020, 1h12
Un avis sur « [CRITIQUE] Slow Machine »