[CONSEILS DU VENDREDI] #12

Ce vendredi, nous vous parlons de : En Liberté !, Silvio et les autres, Bohemian Rhapsody, Le Grand Bal, Ta mort en short(s), Capitaine Conan et Fog.


En Liberté ! : Après la mort de son mari – flic célébré en héros par tous – Yvonne, elle aussi fonctionnaire de police, découvre le passé ripou de celui-ci. Rongée par la culpabilité, elle décide de veiller sur Antoine, innocent  incarcéré jadis à tord par le mari d’Yvonne et qui vient tout juste de sortir de prison. Passé un peu sous silence avec la sortie récente du Grand Bain, il serait pourtant dommage de passer à côté du nouveau film de Pierre Salvadori tant le réalisateur de Hors de prix livre ici une véritable pépite. A la croisée des genres entre le thriller et la comédie pure, En Liberté bénéficie non seulement d’un casting quatre étoiles (Adèle Haenel, Pio Marmaï, Audrey Tautou…) mais également d’une atmosphère complètement barrée et truffée d’un humour absurde à souhait qui réservera quelques grands moments d’hilarité. Une très bonne surprise à aller voir sans hésitation. M.P

Silvio et les autres : Le film commence dans un tourbillon désagréable d’images. Nous suivons Sergio, qui désire atteindre Silvio Berlusconi par la vacuité de la fête. Les quarante-cinq premières minutes se passent donc dans le monde de la nuit. Sergio s’entoure des plus belles femmes, aux dons des plus particuliers, pour réaliser son rêve : travailler pour Lui — sorte d’icône en cire qui aime se pavaner au milieu de jeunes femmes à la plastique parfaite, incrédules ou faussement incrédules. Paolo Sorrentino aime ce mélange d’images vulgaires sur fond de musique. Il avait déjà fait l’exercice du style dans La Grande Bellezza — qui était alors un sous Fellini. Ici rien de plus malaisant que ces longues minutes. Le titre du film apparaît, par ailleurs, sur les fesses d’une femme se faisant prendre en levrette avec un rail de coke dans le dos. L’excessif en pire, et finalement ce n’est même pas abouti : le temps passe lentement. Non, la partie que le cinéaste réussit le mieux — malgré de grandes longueurs également — sont les moments autour de Silvio. Cet homme, enfermé dans un paradis factice, a recréé, à son image, un lieu vide. La première fois que nous le voyons, Silvio est déguisé en djellaba dorée, le visage maquillé et orné de bijoux. L’art de la dissimulation et de la tromperie. Aborder comme une métaphore le personnage semble pourtant peu éloigné de la réalité. Dans son palais, où l’artifice du monde ne se reflète pas seulement sur son visage, les attractions se multiplient jusqu’à l’excès : volcan, manège, enclos à papillons… Sorrentino dresse le récit d’un homme qui s’illusionne en permanence. Et si certains moments sont magnifiques et l’interprétation de Toni Servillo incroyable, le film reste comme son personnage profondément vide et dans l’apparence. Le réalisateur essaye de faire des parallèles vains et propose au spectateur un long portrait d’un magnat de l’industrie et de la politique et gaga de son image, avec des belles femmes dénudées. Un film qui aurait pu être intéressant, mais qui ne passe pas totalement à côté de son sujet, seulement de sa mise en scène. M.M.

Bohemian Rhapsody : On aura beaucoup parlé de Bohemian Rhaspody ces dernières années : après être resté des années en cours de développement, l’avancée du projet avait par la suite été entravée par de nombreux problèmes de production (défection de Sacha Baron Cohen initialement choisi pour le rôle-titre puis du réalisateur Bryan Singer en cours de tournage…). Et donc voilà qu’après toutes ces péripéties arrive enfin ce fameux biopic, consacré à la fois à un des chanteurs les plus illustres de tous les temps – Freddie Mercury – mais aussi à un des plus grands groupes de l’histoire de rock… et donc…eh beh…c’est tout ? N’y avait-il pas ainsi matière à faire mieux que ce biopic tout à fait lambda ? Bohemian Rhaspody souffre ainsi de tous les maux du biopic made in Hollywood en se contentant d’effleurer son sujet en énumérant les plus grands moments de l’histoire du groupe sans jamais chercher à faire preuve de véritable profondeur. Bien sûr, on pourra toujours se consoler devant la bonne performance de Rami Malek dans le rôle-titre ou encore devant les fidèles reconstitutions des concerts du groupe qui viennent relever par de brefs élans épiques ce biopic terriblement anecdotique mais c’est toutefois une bien maigre consolation. M.P

Le Grand Bal : Avec sa caméra, Laëtitia Carton nous transmet une histoire du vécu des corps. Pendant 1 h 39, nous contemplons avec fascination la beauté des silhouettes dansantes : jeunes comme vieilles, initiées comme novices, féminines comme masculines, elles sont toutes rassemblées pour un moment de partage et de chaleur. L’idée, c’est de se laisser bercer, emporter, chambouler par la danse, dans une forme de transe collective. On retrouve beaucoup de l’énergie, de la joie et aussi de la nostalgie que véhiculent ces bals : des instants fugaces où les émotions s’expriment par les corps et les rencontres. Il faut noter les très beaux commentaires de la voix off à travers lesquels on ressent l’amour de la réalisatrice pour l’univers du trad. Avec le clip de « En surface » d’Etienne Daho, la langue des signes fait aussi une apparition intéressante du fait du rapprochement entre ce langage des corps dansants et celui des signes (bien qu’arrivant un peu comme un cheveu sur la soupe). On sent que la réalisatrice a mis beaucoup d’elle dans son film. Ce n’est pas une révolution qu’apporte ce documentaire mais une transmission de l’ambiance qui règne au Grand Bal de l’Europe, un collectage des ressentis des danseurs et danseuses, une restitution de la richesse de cette expérience de jour comme de nuit. C’est un moment agréable qui mérite d’être vécu, à défaut de le faire sur le parquet et la terre battue. Pourquoi ce film ? Tout est dit dans le commentaire… « Parce qu’une mazurka céleste vaut toutes les larmes des grands bals. (…) Parce que la bourrée me libère de la pesanteur et fait rire mes pieds. Parce que je ne connais pas de jeu plus drôle et inépuisable qu’un cercle circassien. Parce que danser à deux, à quatre ou à cent, c’est toucher en moi l’incarnation sans âge et la joie pure. » Le Grand Bal, c’est un film qui donnera sûrement lieu à de belles projections alliant danse et cinéma. M.K.

Ta mort en short(s) : Derrière ce titre drôle et intrigant se cachent six manières inventives et originales d’aborder le deuil à travers une grande diversité de techniques d’animation (animation 2D à l’ordinateur, dessin sur papier, papier découpé, marionnettes, pastel gras sur cire). On retient notamment le très beau Pépé Le Morse de Lucrèce Andreae qui avait beaucoup fait parler de lui aux Césars (Meilleur court métrage), à Cannes (Sélection officielle) et Annecy (Prix du Public) en 2017. La réalisatrice nous offre une très belle animation pour aborder avec beaucoup de justesse le deuil d’une famille et questionner le vécu de l’absence d’un être cher par un individu, le tout dans une atmosphère oscillant entre mysticisme et absurde. Ironie, poésie et joie se mêlent dans ce beau programme signé Folimage. Pour les petits et pour les grands à partir de 11 ans. M.K.

Capitaine Conan : C’est un très beau film sur un épisode méconnu de la Première Guerre mondiale – le conflit sur le front de l’Est fin 1918 – que nous a offert Bertrand Tavernier il y a quelques années. Philippe Torreton est inoubliable en chef d’une bande de nettoyeurs de tranchées. Le réalisateur aborde avec beaucoup d’intelligence la guerre hors des tranchées, avec sa précision historique pour laquelle il est si (re)connu : cette guerre n’est pas seulement un combat, c’est un moment d’éveil et de reconnaissance pour certains êtres qui sont enfin pleinement, grâce au conflit. Au cœur de ce récit, il instille un questionnement essentiel : peut-on condamner des héros de guerre ? Il faut absolument (re)découvrir cette œuvre haletante qui vous prend et vous bouleverse pendant 2h10 – le tout en version restaurée. Ici, il n’y a rien de la vision classique du film de guerre rempli de champs de bataille et de combats sanglants. C’est l’homme qui est au cœur de tout cela. M.K.

FogFog, c’est une plongée dans la Californie, non pas celle ensoleillée des cartes postales, mais plutôt celle brumeuse du petit port d’Antonio Bay. Une légende raconte que des marins naufragés dans cette baie, 100 ans plus tôt, viendront hanter la ville et se venger des habitants. Or, cette nuit est arrivée… Le film met en avant des personnages féminins des plus intéressants. Nous retrouvons avec plaisir Jamie Lee Curtis, en jeune femme libre et indépendante qui se trouve là un peu par hasard, au mauvais endroit, au mauvais moment quoi ! Ainsi qu’Adrienne Barbeau, en mère indépendante et fort courageuse face à ces morts-vivants. M.M. et M.K.

Et un petit coup d’oeil à notre article après une nuit d’horreur avec Jean Charpentier au Louxor : ICI.

Marine Pallec, Manon Koken, Marine Moutot

En Liberté !
Réalisé par Pierre Salvadori
Avec Adèle Haenel, Pio Marmaï, Damien Bonnard
Comédie, France, 1h48
31 octobre 2018

Silvio et les autres
Réalisé par Paolo Sorrentino
Avec Toni Servillo, Elena Sofia Ricci, Riccardo Scarmacio
Biopic, Drame, Italie, France, 2h38
31 octobre 2018

Bohemian Rhapsody
Réalisé par Bryan Singer
Avec Rami Malek, Mike Myers
Biopic, Drame, États-Unis, 2h15
31 octobre 2018

Le Grand Bal
Réalisé par Laëtitia Carton
Documentaire, France, 1h39
31 octobre 2018

Ta mort en short(s)
Programme de 6 courts métrages
Films d’animation sur le deuil, France, Suisse, 54 min
31 octobre 2018

Capitaine Conan
Réalisé par Bertrand Tavernier.
Avec Philippe Torreton, Samuel Le Bihan, Bernard Le Coq
Guerre, France, 2h10
1996 – Ressortie le 31 octobre 2018

Fog (The Fog)
Réalisé par John Carpenter.
Avec Adrienne Barbeau, Jamie Lee Curtis, Janet Leigh
Horreur. Etats-Unis. 1 h 29
1980 – Ressortie le 31 octobre 2018

 

Publié par Phantasmagory

Cinéma - Série - VR

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