Du 11 au 17 décembre 2019 se tenait la 9e édition du Paris International Fantastic Film Festival (PIFFF) au Max Linder Panorama, sur les Grands Boulevards. Deux de nos rédactrices s’y sont rendues pour vous donner un petit aperçu du cru 2019. Amateur.trice.s d’horreur, de magie et de frissons ou simples curieu.se.s, vous êtes les bienvenu.e.s !
Le Palmarès de la 9e édition du PIFFF
Comme les années précédentes, nous avons pu voter pour décerner l’Œil d’or au meilleur de la compétition. Une bonne idée de proposer au public de voter.
Le jury courts-métrages français était composé de Lilith Bekmezian, Noëmie Devide, Mounia Meddour, Jérémy Clapin et Alex Pilot.

Le jury Ciné+ Frisson est constitué de Myriam Hacène (directrice générale de Ciné +) et Christophe Commères (directeur adjoint).
Un jury de lecteurs du magazine Mad Movies a également décerné ses prix.
Œil d’or et Prix du Jury Mad
Why don’t you just die ! de Kirill Sokolov
Prix du Jury Ciné + Frisson
I see you de Adam Randall
Œil d’or du court-métrage française
Dibbuk de Dayan D. Oualid
Prix du jury Ciné + Frisson et du jury Mad du court-métrage
Boustifaille de Pierre Mazingarbe
Œil d’or du court-métrage internationale
My little goat de Tomoki Misato
Le Grand Prix Climax du Scénario
Sacrifice de Mathieu Delozier & Joël Petitjean
Impressions
2019, première année au PIFFF pour l’équipe de Phantasmagory. Pour cette neuvième édition, les programmateurs ont reçu plus de 600 films. Nous étions là dès la séance d’ouverture pour Color out of space, une adaptation d’une nouvelle de H.P. Lovecraft. Séance interdite aux moins de 16 ans. Les limites d’âge nous semblent assez exagérées au festival. Petite hypothèse : les films n’étant pas encore sortis en France, ils n’ont pas pu passer en commission et donc la limite maximale (en fonction des thématiques du film) est attribuée pour la projection en festival ?
Maintenant, observons un peu le PIFFF. Il existe plusieurs catégories : les films en compétition, les courts métrages (français et internationaux séparés), les séances cultes et les films hors compétition. Jury, public et producteurs sont invités à voter. Après plusieurs jours de festival, nous nous sommes rendues compte que le public était décidément très masculin et c’est fort dommage car tout le monde devrait profiter de cette programmation ! En tout cas, l’accueil était vraiment sympa (beaucoup de bénévoles aux aguets) et les présentations des films par Fausto, le directeur artistique, très appréciables et intéressantes. En plus de cela, il était souvent accompagné des équipes invitées. Par ailleurs, des courts métrages sont projetés en avant programme de certains films. C’est vraiment une bonne idée ! Petit point bonus très apprécié, avant chaque séance, en plus des bandes annonces du PIFFF et de ses partenaires, ainsi qu’un spot animé hilarant sur le civisme au cinéma. Rébarbatif ? Point du tout ! Texas Chainsaw, Freddy les griffes de la nuit, Scream, un zombie en plein repas et un gauchiste “de principe” excédé, assis (plus ou moins) sur les fauteuils rouges du cinéma. Voilà nos interlocuteurs, et c’est plutôt convaincant.
Édito de l’équipe du festival
Que peut-on encore défricher quand l’époque est à l’ultra-globalisation culturelle ? Quels films de qualité peut-on vous proposer sans céder à toutes les tendances festivalières ? Faut-il au contraire s’engager dans la voie des « valeurs sûres » et vous offrir une programmation aux aspérités finalement très prévisibles ? Comme vous pouvez le constater, le temps n’a pas calmé notre surchauffe réflexive, et à une année de notre premier « grand » anniversaire (le 10ème, pour ceux qui auraient quelques problèmes avec les chiffres), dans un contexte de distribution qui a beaucoup évolué (mais ne lançons pas le débat maintenant, il y a les inter-séances pour ça), nous aussi, nous entamons une douce mutation qu’on espère convaincante. Ainsi, cette année, le festival accuse une durée subtilement rallongée, afin de vous donner plus et peut-être à de meilleurs moments. Puis, jamais le PIFFF ne s’était à ce point diversifié dans son approche des genres, tordant encore un peu plus le cou à tous les concepts figés de classification, et s’engageant dans l’exploration de cinématographies souvent trop peu mises en avant. Alors en attendant de souffler nos dix bougies, venez déjà goûter le gâteau de cette neuvième édition : on peut vous assurer de sa générosité et de sa saveur.
Et pour bien commencer ce récap, voici le trailer de l’édition 2019 : ici.
JOUR 1 : Mercredi 11 décembre
La séance d’ouverture est complète. Joli succès malgré la grève des transports qui a commencé le 5 décembre. L’équipe est accueillante et le discours de bienvenue des programmateurs-organisateurs particulièrement drôle. S’ajoutent à cela une intervention de la Mission Cinéma de Paris et de l’exploitante du Max Linder Panorama.
19 h 30 : Ouverture – Color Out of Space (Richard Stanley, 2019)
Les Gardner viennent tout juste d’emménager dans une vieille demeure en pleine campagne d’Arkham. Une nuit, une météorite s’écrase avec fracas dans leur jardin. Une étrange lumière colorée en émane. Leur environnement commence alors à changer de manière inquiétante.
“Le Cage nouveau est arrivé !” et cela en réjouit plus d’un (notamment dans cette salle pleine à craquer de la séance d’ouverture du PIFFF). Color out of space est l’adaptation de La couleur tombée du ciel de H.P. Lovecraft dont la sortie est prévue pour 2020. Assez fidèle au texte, bien qu’ayant décidé de s’attacher à des personnages principaux quasiment absents de la nouvelle (ou très peu décrits), Color out of space va sûrement diviser. Transposition plus moderne (le récit original suit le fermier Nahum vers 1880), les grands thèmes restent présents : horreur cosmique, couleur étrange, mutations, cheminement vers la folie, drame écologique… Malheureusement, l’idée de faire d’une adolescente rebelle en pleine crise wiccane le personnage principal de cette histoire passionnante (à l’origine) ne semble pas des plus judicieuses. De même que de tomber dans les clichés habituels : étranger nouvellement arrivé qui sert de love interest à la jeune fille, frère adolescent mou et fumeur de pétards, petit garçons faisant des dessins étranges. On apprécie tout de même l’ajout du vieux hippie paranoïaque et de sa chatte Point G, de la maire totalement égocentrique et médiatisée et des alpagas (à la place des chevaux). La répétition de plans sur l’eau (fil conducteur de la malédiction) fonctionne bien. Mais l’ensemble (et notamment les dialogues) manque de finesse. La précision de la dépiction de l’étrangeté et de son développement dans l’oeuvre originelle aurait été bienvenue dans le film. Les quelques scènes absolument délirantes de Cage faisant du Cage (les tomates !) et la beauté de la couleur et des paysages devraient tout de même séduire les fans.
Petite déclaration du réalisateur au Q&A après le film : “J’adore les alpagas.” Si vous le voyez, vous comprendrez pourquoi. Lorsque les lumières se rallument, certaines personnes semblent un peu ennuyées par le rythme assez lent, comme moi. Deux hommes s’extasient sur la qualité de l’adaptation de la nouvelle de H.P. Lovecraft, “La couleur tombée du ciel”. Vous pouvez d’ailleurs la lire (très courte, 15 pages tout au plus), par là.
En avant-programme : Abyssus – Kim Westerlund (Finlande – 2018)
Un homme se réveille dans un cercueil. Il a été enterré vivant.
Un court métrage moyennement intéressant qui repose surtout sur l’atmosphère d’horreur qu’il veut générer. Malheureusement, même sur grand écran, ça ne fonctionne pas vraiment.
JOUR 2 : Jeudi 12 décembre
Il est fascinant de voir que, même par temps de pluie et de grève, le public est au rendez-vous et en nombre. Premier long-métrage de la compétition que nous découvrons : The Mortuary Collection. Pour les films en compétition, c’est le public qui vote avec de petits cartons allant de 1 (navet) à 5 (chef d’oeuvre).
19 h 15 : Compétition – The Mortuary Collection (Ryan Spindell, 2019)
Une jeune voleuse un peu trop curieuse, un mari fatigué de s’occuper de sa femme malade, un étudiant séducteur profitant de la naïveté des nouvelles arrivées et un tueur d’enfant qui n’est pas celui qu’on croit… Les récits vont bon train dans la société funèbre de Montgomery Dark. Faites attention de ne pas vous perdre dans les méandres du récit, cela pourrait vous coûter la vie.
The Mortuary Collection a été l’une des bonnes surprises de ce festival. Avec son côté un peu Chair de poule (un enfant qui veut faire une enquête sur d’étranges pompes funèbres, le conteur et les récits enchâssés), on entre très facilement dans l’intrigue. D’ailleurs, le film s’ouvre sur un livre intitulé « The Mortuary Collection » dans lequel le spectateur plonge. Un peu cheap, déjà vu, mais on accepte. Le conteur, incarné par le physique imposant et la voix caverneuse de Clancy Brown — très bonne idée —, est le directeur des pompes funèbres, un étrange personnage aux allures de Frankenstein. Une jeune femme curieuse et téméraire débarque chez lui et lui demande les histoires des cadavres qu’il héberge et embellit. Nous voilà plongés dans quatre histoires de plus en plus déroutantes. À l’origine de tout cela, un court métrage The Babysitter Murders que le réalisateur voulait insérer dans un long. Le tout pourrait sembler un peu immature et très adolescent, notamment avec sa lumière jaune, son humour et sa morale (tel est pris qui croyait prendre ; tout méfait finit par être puni), mais, on se laisse porter et surprendre. Par ailleurs, la dimension comique séduit. Des histoires parfois un peu ridicules — au début — ou absurdes font sourire pour aller de plus en plus vers le drame, toujours dans une dimension parodique. L’hommage final à Halloween en fait un sympathique pastiche.
21 h 30 : Hors-Compétition – Leap of Faith : William Friedkin on The Exorcist (Gilles Penso et Alexandre Poncet)
Un “Acte de foi” pour lequel je n’ai malheureusement pas eu la foi, la pluie tombant à torrents et ma température corporelle ayant chuté brutalement pendant la séance de The Mortuary Collection. C’est bien dommage car il est toujours intéressant d’en découvrir plus sur Friedkin. Si vous souhaitez, comme moi, rattraper la présentation du documentaire au PIFFF par son réalisateur, Alexandre O. Philippe, c’est par là :
JOUR 3 : Vendredi 13 décembre
La seconde comparse de Phantasmagory rejoint cette édition pour une première séance du vendredi bien hallucinée. Le public est toujours au rendez-vous !
19 h 30 : Compétition – The Wave (Gille Klabin, 2019)
Frank est un avocat d’affaire qui a enfin trouvé le dossier qui va le faire devenir riche. Marié et avec une hypothèque sur le dos, sa vie semble bien rangée. Alors qu’un soir il sort avec un ami, il prend un hallucinogène qui change le cours de son histoire.
Ce premier film américain a des allures de Very Bad Trip mais avec des hallucinogènes. Nous retrouvons tous les clichés du genre : le mec est un salaud, demain c’est le grand jour où il va enfin briller en sauvant la mise de son entreprise véreuse, il sort malgré tout, sa femme est une connasse finie qui n’en veut qu’à son argent, il rencontre une femme fantastique (mais il la fantasme complètement)… L’enchaînement classique monte en intensité au fur et à mesure pour une fin à la morale douteuse. Le délire autour de l’harmonie du monde – que chacun y a sa place – est mélangé à une bonne dose de misogynie ! Tous les personnages féminins sont soit fantasmés, soit hystériques. Tout la dimension fantastique du film est créée par la possibilité de voyager dans le temps — enfin dans son esprit – et c’est le seul élément un tant soit peu intéressant. Mais, tout de même, cela fait plaisir de voir Justin Long — même s’il ne semble pas capable de jouer autre chose que des pseudo films d’adolescent. C’est long et convenu, mais on ne s’ennuie pas non plus.
Avant-programme : Bienvenue – Vincent Julé (France – 2019). En présence du réalisateur qui « espère qu’on se souviendra de lui quand on louera un Airbnb ».
Un couple vient passer le week-end dans un charmant Airbnb. Ils découvrent avec stupeur la présence d’un jeune garçon, seul dans une chambre. La suite va les surprendre.
Un court-métrage surprenant qui compte surtout sur l’effet de choc. C’est une intéressante idée d’inscrire son décor dans un Airbnb qui peut effectivement être un bon ressort horrifique (l’inconnu). Sympathique malgré tout que vous pouvez regarder ici :
JOUR 4 : Samedi 14 décembre
Une journée bien chargée avec des séances de 11h30 à 21h30. Nous évitons les deux derniers films : un long-métrage indien sur fond de fête tamoule, Jallikattu, et le Bulgare post-apocalyptique à base de cochons mutants, Bullets of Justice (avec Danny Trejo de Machete). Nous étions moyennement motivées. À noter, le show impressionnant du contorsionniste Troy James (The Nest).
11 h 30 : Courts métrages français

Avis sur le programme : Six films assez différents plus ou moins intéressants. Petite déception quant à la qualité et l’intérêt de l’ensemble. Mais cela fait toujours plaisir de voir des courts métrages.
400 mpH – Paul-Eugène Dannaud, Julia Chaix, Lorraine Desserre, Alice Lefort, Natacha Pianeti, Quentin Tireloque (France – 2019)
Sur le lac de sel de Bonneville, un chimpanzé tente de dépasser la limite de vitesse maximale de 400 mpH à bord de son véhicule.
400 mpH est un court métrage de fin d’études de six étudiants de Supinfocom. Au niveau technique, il s’agit d’une sacrée prouesse de CGI : le chimpanzé est très bien fait et rappelle d’ailleurs César de La Planète des Singes. Les thématiques de la détermination et de la répétitivité deviennent rapidement claires et on aura appris que la limite de vitesse maximale est de 400 mpH (avec une légère surprise finale). Petit hic, en dehors de cela, le court métrage n’a pas de réelle finalité et semble plutôt être une démonstration de maîtrise des effets spéciaux.
Boustifaille – Pierre Mazingarbe (France – 2019)
Daphné, 25 ans, aime beaucoup les histoires d’amour. Mais cette fois-ci, problème, elle est vraiment amoureuse et l’élu de son coeur veut rencontrer ses parents. Elle est sérieusement dans la panade car ceux-ci ont des pratiques alimentaires quelque peu étranges.
Second visionnage après le Festival européen du film court de Brest et toujours aussi bon. Simple, drôle et efficace, ce court métrage carnassier devrait en séduire plus d’un et donne une touche d’humour à cette programmation du PIFFF pour le moins dramatique.
Pour relire la critique de Boustifaille et découvrir nos autres coups de coeur du Festival européen du film court, c’est par là.
Dibbuk – Dayan D. Oualid (France – 2019)
Sarah, la femme d’Eli, appelle Dan, un homme très pieux. Elle s’inquiète pour son mari qui ne semble pas être dans son état normal. Constat fait, il est possédé par le Dibbouk, un démon de la mythologie juive. Dan doit alors organiser son exorcisme.
Dibbuk nous plonge directement dans le contexte d’une communauté juive par la musique (B.O. du clarinettiste klezmer français Yom – réussie et entraînante), la prière, de petits objets rituels… Et surtout directement dans le mythe du dibbouk, démon rattaché à un corps humain qu’il habite. Intéressant mais un peu long, le film manque d’originalité et de liant pour donner un véritable sens à l’ensemble. Il s’agit d’un exorcisme classique à la photographie sombre. On reste malheureusement un peu sur sa faim, même si les références culturelles donnent envie d’en savoir plus. Cela aurait peut-être mérité un peu plus de complexité ?
Mass – Fu LE, Adrien Gontier (France – 2019)
Dans les ruines d’un entrepôt, un homme danse aux côtés d’autres, comme un seul être, une masse. Puissance, union et résistance.
Dans le cadre d’un atelier, quarante danseurs amateurs ont réfléchi à la masse, à la foule, à l’individu et au collectif, dans un entrepôt parisien aux allures dystopiques. Les corps ne font qu’un, puis l’un d’entre eux en ressort, résiste, s’immerge, se décale. Il manque un élément pour que cette mise en scène acquiert une véritable puissance. Chorégraphie filmée plus que film de cinéma, on peine à trouver le fil d’un récit et on penche plus vers le clip. Belle prouesse tout de même !
On the other side – Zulma Rouge (France – 2018)
Un agent secret dérobe une clef qui lui donne accès à son voeu le plus cher. Rêve ou réalité ?
Réflexion sur le fantasme et la dépendance aux nouvelles technologies, On the other side propose un contenu intéressant. L’ouverture surprenante ancrée dans le rêve nous entraîne vers un triste constat teinté de beaucoup d’humour noir. La solitude et l’aveuglement de l’individu sont glaçants. Plutôt réussi dans son propos, le court métrage reste tout de même classique mais vaut le détour.
Washout – Alexandre Masson (France – 2019)
Il est tard. Etienne quitte son poste au S.A.V d’une entreprise de machine à laver pour rentrer chez lui. La sonnerie retentit. Il décroche. Il n’est pas au bout de ses surprises.
La soirée d’Etienne, employé modèle spécialiste ès-machine à laver, était une bonne idée de scénario. Le film travaille sur l’aliénation et la surprise. Malheureusement, un peu lent, il met du temps à se mettre en place et peine à trouver une conclusion. Aurait-il dû être plus choquant ? Plus humoristique ? Plus décalé ? À vous d’en juger !
14 h 30 : Compétition – The Nest (Roberto De Feo, 2019)
Samuel, un jeune garçon tétraplégique, vit avec sa mère dans une grande demeure isolée du reste du monde. Denise, une jeune fille mystérieuse, emménage chez eux. Cette nouvelle arrivée va ouvrir les yeux à Samuel qui n’arrive plus à supporter cette vie étouffante.
The Nest plonge le spectateur dans une ambiance sombre et gothique. Un vrai film fantastique qui repose sur la tradition italienne des films d’horreur. (dossier Argento), Mais actuellement, le cinéma italien ne sort plus beaucoup de films de genre et encore moins des films d’horreur. Ce film est donc inscrit dans un contexte difficile et a dû se faire avec presque rien. Un vrai défi pour ce premier long-métrage que Roberto De Feo, le réalisateur, a réussi à relever. (Sony a par ailleurs acheté les droits pour en faire un remake). Plutôt que de chercher à faire des jumps scares ou de multiplier les apparitions de monstres effrayants, le récit se focalise sur la relation dramatique d’une mère et d’un fils isolés dans une grande maison. Le personnage de la mère — jouée par Francesca Cavallin, qui est une véritable révélation pour le public du PIFFF — est passionnant, car très complexe dans son rapport à son domaine, aux autres membres de la communauté et à son fils, Samuel. Bien que quelques éléments de l’histoire auraient mérité d’être mieux exploités — nous restons un peu sur notre faim —, les personnages sont très bien écrits comme l’environnement pseudo utopique dans lequel ils évoluent. La fin, par ailleurs, révèle une toute nouvelle dimension du film et se trouve être une excellente et surprenante idée — nous ne vous en disons pas plus. The Nest a de plus la chance d’avoir à son casting le contorsionniste Troy James (Hellboy, Scary Stories, The Strain, Channel Zero, Flash). Sa performance est impressionnante — là non plus nous n’en disons pas plus. Un premier film réussi malgré des longueurs et un petit problème de rythme.
19 h 30 : Compétition – Extra Ordinary (Mike Ahern, Enda Loughman, 2019)
Rose est une monitrice d’auto-école qui communique avec les morts. Suite à un tragique accident impliquant un nid de poule et un chien, elle ne veut plus utiliser son talent. Alors que la fille d’un homme charmant est ensorcelée par un ancien chanteur à succès pour être sacrifiée lors d’un rite satanique, elle n’a plus d’autre choix que d’agir.
Ce long-métrage irlandais à l’humour décalé a été écrit par un duo de réalisateurs pour l’écrivaine et humoriste de woman show, Maeve Higgins. Si vous ne connaissez pas, cela vaut le coup d’aller voir ses vidéos où elle parle de sujets engagés avec humour. C’est une actrice née. Pour son premier film en tant qu’actrice, nous la trouvons dans le registre de la comédie sans prise de tête. Avec un melting pot de références pop et d’histoires de fantômes (Ghostbuster, L’Exorciste…), le récit réussit à avoir sa propre voix et arrive à une scène finale surprenante — dans le bon sens du terme. Avec son personnage principal particulièrement touchant de célibataire quadragénaire, le reste du casting est composé d’acteurs et actrices tout aussi bons : l’Irlandais Barry Ward (Jimmy’s Hall), l’Américain Will Forte (The Last Man on Earth) et l’Australienne Claudia O’Doherty (Love) qui est excellente. Les personnages féminins sont d’ailleurs assez savoureux et cela fait particulièrement plaisir. Petit coup de coeur pour la surprenante Bonnie, la femme de Martin qui revient d’entre les morts. Extra Ordinary est une comédie parodique tout en finesse qui s’inspire par ailleurs d’un couple irlandais qui travaille le week-end en tant que chasseurs de fantôme. Humour britannique de haut niveau garanti !
Véritable coup de cœur du festival, aussi récompensé au BIFFF (Brussels International Fantastic Film Festival). Phantasmagory recommande !
JOUR 5 : Dimanche 15 décembre
Journée un peu moins motivante : un film de crocodile puis du gore et un classique. On rentre chez soi regarder Battle Royale. On fera mieux demain !
11 h 30 : Hors-Compétition – The Pool (Ping Lumpraploeng, 2018)
À l’issue d’un tournage publicitaire, un technicien s’endort sur un matelas pneumatique dans la piscine de 6 mètres de profondeur. Réveil brutal et constat glaçant : le niveau de l’eau a suffisamment baissé pour qu’il ne puisse plus remonter. Et il n’est pas au bout de ses peines….
Et un film de crocodile, un ! The Pool est un film thaïlandais dont le scénario est simple. Prenez un technicien de cinéma, la copine de ce premier type, un peu maladroite, un chien, un crocodile et une piscine de 6 m de profondeur complètement vidée de son eau. Plouf, tous dans la piscine (sauf le chien) ! Maintenant, 1 h 30 pour savoir si nos héros vont réussir à s’en sortir. L’atmosphère un peu stressante d’enfermement fonctionne (en osmose avec le ressenti du réalisateur pendant le tournage, d’après lui). Tout du moins au début. Mais rapidement, la situation allant de mal en pis fatigue et le film peine à relancer l’intérêt du spectateur. La CGI du crocodile est moyenne (mais il semble aussi y avoir eu un vrai croco sur le tournage et lui est évidemment convaincant). L’image est belle, mais ce n’est pas suffisant. Cela reste tout de même intéressant de voir un film thaïlandais, mais, avec trente minutes de moins, cela n’aurait pas été choquant.
17 h : Séance Culte – Battle Royale (Kinji Fukasaku, 2000)
La classe de 3e B du collège Shiroiwa a été sélectionnée pour participer à la Battle Royale. Les règles sont simples : ils ont trois jours pour s’entretuer jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un ou une survivant.e. Chaque année, une classe est choisie au hasard et ils ont la chance d’être sélectionnés…
Le livre est un véritable coup de poing à la philosophie très noire qui correspondait à l’adolescente que j’étais. Avant Hunger Games, Battle Royale, écrit par Kōshun Takami, sort en 1999. Il sera adapté par la suite en manga, puis en film en 2000. Contrairement à l’idée que les « jeux » sont faits pour être médiatisés et commentés qu’a imposé le monde dystopique de Hunger Games, la loi Battle Royale s’inscrit dans un contexte beaucoup plus neutre. Une classe prise au hasard, des collégiens qui ne semblent pas trop être au fait, tout cela pour rassurer les adultes qui ne font plus confiance à la jeunesse. Tout se fait donc dans l’ombre. Personne ne veut savoir ce qui se passe sur l’île. Seuls des militaires et un professeur complètement sadique sont là pour encadrer l’événement. Le long-métrage japonais est d’une rare violence car il met en avant des meurtres crus dans une mise en scène aux couleurs très sobres. Les effets de caméra — parfois un peu exagérés comme le jeu des acteurs et actrices à certains moments — renvoient à une ambiance manga : gros plan sur les visages, zoom exagérés, variations nombreuses d’échelle de plan, ralentis… Par ailleurs, le cinéaste utilise beaucoup de musique classique comme pour inscrire un décalage entre ce qui se passe et le propos du film. Si certains moments ont assez mal vieilli — surtout les flashbacks qui montrent les problématiques des adolescents et le monde dans lequel ils évoluent — Battle Royale reste un film fort et important.
JOUR 6 : Lundi 16 décembre
Apparition rapide au festival pour une dernière séance. Les spectateurs étaient très enthousiastes quant au film précédent, Super me.
17 h : Séance Culte – Théâtre de sang (Douglas Hickox, 1973)
Edward Lionheart, comédien frustré d’avoir été rejeté par la critique, fait croire à sa mort et décide de se venger en fomentant les meurtres très shakespeariens de ces plumes acérées.
Théâtre de sang est un classique britannique du genre avec Vincent Price, figure récurrente de l’horreur, en rôle principal. Après les deux Docteur Phibes et juste avant Madhouse, le film s’inscrit dans une réflexion en pastiche sur le cinéma d’épouvante qui apparaît dans les années 70 : le cinéma d’horreur se commente et se moque de lui-même. Assez drôle bien qu’un peu longuet, on apprécie la théâtralité un peu datée de Price et de ses acolytes. Tout l’intérêt est de deviner les mises en scène des meurtres à venir sur le mode shakespearien. Qui connaît bien ses classiques ?
JOUR 7 : Mardi 17 décembre
Pas de festival pour nous aujourd’hui mais on a rattrapé Emprise chez nous (Matthew McConaughey oblige !).
16 h 30 : Séance Culte – Emprise (Bill Paxton, 2001)
Texas, années 2000, un tueur en série sévit sous le nom de “La Main de Dieu”. Un homme, Fenton Meiks, se rend au QG du FBI et déclare connaître l’identité du coupable : il s’agit de son frère Adam. Tout a commencé en 1979.
Ce premier long métrage de l’acteur-réalisateur Bill Paxton n’est pas vraiment une réussite. Film mineur malgré un pitch intéressant au premier abord, Emprise n’arrive pas vraiment à créer une atmosphère de tension et de doute. Tant et si bien que lorsque des éléments clefs de l’intrigue sont révélés, cela ne suffit pas à nous réveiller, malgré une jolie performance de Matthew McConaughey.
De bonnes découvertes pour l’équipe de Phantasmagory pour cette première fois au PIFFF, bien que nous n’ayons pas pu être présentes le dernier jour. Nous avons pu voir quatre films de la compétition sur dix. On essayera de faire mieux à la prochaine édition. À rattraper pour nous (et vous ?) : I see you, Spiral, Super me, The Hole in the Ground, Vise et Why don’t you just die ?. À noter aussi que cette édition a été particulièrement touchée par le peu de transports encore actifs dans Paris du fait des grèves dues à la réforme des retraites. Les organisateurs du PIFFF ont noté une baisse de 20% de la fréquentation. Les spectateurs restaient au rendez-vous ! Par ailleurs, il reste difficile de trouver un cinéma de genre de qualité. Il n’empêche que le PIFFF propose une certaine diversité de sujets entre les crocodiles, les zombies, les possessions, les drogues… Et il permet aussi de donner de la visibilité à des films de diverses nationalités (russe, thaï, japonais, irlandais…) qui ne passent souvent pas les frontières de leur pays. Nos films préférés : les comédies sur fond d’horreur (Extra Ordinary, Boustifaille ou encore The Mortuary Collection). On remarque aussi que la plupart des films ne versent pas tant dans le fantastique que dans le gore (sur fond de dystopie ou d’horreur). Et ça, ça plait (moyennement pour nous) ! C’est d’ailleurs Why don’t you just die ?, une comédie gore russe, qui a remporté l’Oeil d’or du long-métrage international.
Allez, on se dit à l’année prochaine pour plus d’horreur et de fantastique !
Manon Koken et Marine Moutot
Crédit photo : Jean-Baptiste Deucher pour le PIFFF.
Color out of space
Réalisé par Richard Stanley
Avec Nicolas Cage, Madeleine Arthur, Q’Orianka Kilcher
Fantastique, Horreur, Etats-Unis, Malaisie, Portugal, 1h51
Date de sortie inconnue
The Mortuary Collection
Réalisé par Ryan Spindell
Avec Clancy Brown, Caitlin Custer, Christine Marie Kilmer
Horreur, Etats-Unis, 1h48
Date de sortie inconnue
The Wave
Réalisé par Gille Klabin
Avec Justin Long, Donald Faison, Sheila Vand
Science-fiction, Etats-Unis, 1h28
Date de sortie inconnue
The Nest (Il Nido)
Réalisé par Roberto De Feo
Avec Francesca Cavallin, Justin Korovkin, Ginevra Francesconi
Drame, Horreur, Italie, 1h48
Date de sortie inconnue
Extra Ordinary
Réalisé par Mike Ahern, Enda Loughman
Avec Maeve Higgins, Barry Ward, Will Forte
Comédie, Fantastique, Horreur, Irlande, Belgique, 1h38
Date de sortie inconnue
The Pool
Réalisé par Ping Lumpraploeng
Avec Theeradej Wongpuapan, Ratnamon Ratchiratham
Horreur, Thaïland, 1h30
Date de sortie inconnue
Battle Royale
Réalisé par Kinji Fukasaku
Avec Tatsuya Fujiwara, Aki Maeda, Tarô Yamamoto, Takeshi Kitano
Horreur, Action, Japon, 1h54
21 novembre 2001
Théâtre de sang
Réalisé par Douglas Hickox
Avec Vincent Price, Diana Rigg, Ian Hendry
Horreur, Angleterre, 1h42
16 août 1973
Emprise
Réalisé par Bill Paxton
Avec Bill Paxton, Matthew McConaughey, Powers Boothe
Thriller, États-Unis, Allemagne, Italie, 1h40
15 mai 2002
3 commentaires sur « Retour sur le PIFFF – Paris International Fantastic Film Festival »